Subjectivité et vérité
Darthmouth College 17 novembre 1980 – Berkeley 20
octobre 1980
Foucault, Michel (2013). L'origine de l'herméneutique de soi. Conférences prononcées à Darthmouth College, 1980. Éd. établie par H.-P. Fruchaud et D. Lorenzini. France : Vrin.
1840 F.
Leuret psychiatre français, Du traitement
de la folie. Douche froide sur la tête du patient jusqu’à qu’il admet son délire.
(P.31) à La
technique de Leuret est une
transposition dans la thérapie psychiatrique de procédures d’avouer qui ont été
longtemps utilisées dans les institutions judiciaires et religieuses.
Avouer :
déclarer à haute et intelligible voix la vérité au sujet de soi-même (p. 32). Considéré, dans le monde
occidental, comme condition de la remise de ses péchés, soit comme un point
essentiel de la condamnation du coupable.
Tout le monde dans la médecine ancienne, avant le milieu
du XIXe siècle, était persuadé qu’il y avait incompatibilité entre
la folie et la reconnaissance de la folie.[1]
SXVII-SXVIII
Thérapies de vérité.
[Point de
départ, justification théorique et cible critique des analyses : ] Postulat
accepté dans les sociétés occidentales, qu’on a besoin pour son salut de savoir
aussi exactement que possible qui l’on est et aussi de le dire aussi
explicitement que possible à d’autres personnes. (p. 32-33) à objectif
: faire histoire (politique) du vérité (p.
53, nota 3), faire généalogie du sujet moderne (p.33)
SXX avant et
après de la seconde guerre mondiale, philosophie du sujet [motifs philosophiques,
institutionnels, politiques]. Con l’après-guerre la importancia del sujeto deja de ser evidente à 2 paradojas
Position
Foucault: «J’ai essayé de sortir de la philosophie du sujet en faisant une
généalogie du sujet, en étudiant la constitution du sujet à travers l’histoire
qui nous conduit au concept moderne du soi » (p. 35) « maintenant je souhaite étudier ces formes de connaissance
que le sujet crée au sujet de lui-même »
Nota b, p. 35-37 : Méthodologie : l’histoire des sciences est un terrain fertile pour
l’étude de la généalogie du sujet parce que : 1) organisation scientifique du
savoir : toutes les pratiques par lesquelles le sujet est défini et transformé
sont accompagnées par la formation de certains types de savoir ; et en Occident
le savoir tend à être organisé autour de formes et de normes qui sont plus ou
moins scientifiques ; 2) obligation de vérité :
l’un des principales obligations morales de tout sujet est de se
connaître lui-même, de dire la vérité au sujet de lui-même à de se constituer comme objet de savoir. (Berkeley b, p. 35) // L’objectif
de mon projet est de construire une généalogie du sujet. La méthode est une archéologie du
savoir, et le domaine précis de l’analyse est ce que je dois appeler
technologies : je veux dire l’articulation de certaines techniques et de
certains types de discours à propos du sujet.
// Dimension politique de
l’analyse : Il s’agit de chercher un autre type de philosophie critique […] qui
cherche les conditions et les possibilités indéfinies d’une transformation du
sujet, de notre propre transformation. (voir
note 16)
(Note 8, p. 55): « Il s’agissait donc pour moi de se dégager des équivoque
d’un humanisme si facile dans la théorie et si redoutable dans la réalité ; il
s’agissait aussi de substituer au principe de la transcendance de l’ego la
recherche des formes d’immanence
du sujet » [HS, p. 507]
4 types
techniques, la troisième est constitué par les technique de domination: « les
techniques qui permettent de déterminer la conduite des individus, de leur
imposer certaines volontés et de les soumettre à certaines fins ou à certains
objectifs » (p. 37), la quatrième est
constitué par les « technologies de soi » : « techniques qui permettent aux
individus d’effectuer, par eux-mêmes, un certain nombre d’opérations sur leurs
propres corps, sur leurs propres âmes, sur leurs propres pensées, sur leur
propre conduite, et cela de manière à se transformer eux-mêmes, se modifier
eux-mêmes et atteindre un certain état de perfection, de bonheur, de pureté, de
pouvoir surnaturel, etc. » (p. 38)
« Si l’on
veut étudier la généalogie du sujet dans la civilisation occidentale, il faut
tenir compte non seulement des techniques de domination, mais aussi des
techniques de soi. Disons qu’on doit tenir compte de l’interaction entre ces
deux types de techniques » (p. 38) « Le
point de contact, où [la façon dont] les individus sont dirigés par les autres
s’articule sur la façon dont ils se conduisent eux-mêmes, est ce que je peux
appeler, je crois, gouvernement. Gouverner les gens […] il y a toujours un
équilibre instable […] entre les techniques qui assurent la coercition et les
processus par lesquels le soi se construit ou se modifie par lui-même » (p. 39)
Considérations
sur le pouvoir et autocritique : « Nous ne devons pas comprendre l’exercice du
pouvoir comme pure violence ou stricte contrainte. Le pouvoir est fait de
relations complexes : ces relations comportent un ensemble de techniques
rationnelles, et l’efficacité de ces techniques vint d’un alliage subtil de
technologies de contrainte t de technologies de soi. Je crois que nous devons nous débarrasser du schéma plus ou moins
freudien – vous le connaissez – le schéma de l’intériorisation de la loi par le
soi. » (p. 39)
2 procédures
orientés vers la formulation de la vérité sur soi-même : « Parmi les techniques
de soi […] je crois que les techniques orientées vers la découverte et la formulation
sur soi-même sont extrêmement importantes ; et si pour le gouvernement des gens
dans nos sociétés chacun devait non seulement obéir, mais aussi produire et
rendre publique la vérité sur lui-même, alors l’examen de conscience et l’aveu seraient parmi
les plus importantes de ces procédures. » (p.
40)
Objectif : «
mettre l’accent sur une transformation
[…] produite au début de l’ère chrétienne quand l’obligation de se connaître
soi-même (gnôthi seauton) est devenue
le précepte monastique “Avoue à ton guide spirituel chacune de tes pensées”.
Cette transformation est […] d’une certaine importance dans la généalogie de la
subjectivité moderne à avec elle
commence l’herméneutique de soi » (p.
40).
Berkeley b, p.40-41 à met l’emphase dans le précepte [pas dans la transformation], est plus explicite
: « Les techniques orientées à […]] la
formulation de vérité sur soi-même sont importantes […] parce que pour le gouvernement […] chacun
devait […] produire la vérité sur soi-même ». Il veut « montrer la
transformation, à travers de ces deux procédures, du veux précepte delphique
“connais-toi toi-même” dans le précepte monastique “dis-moi chacune de tes
pensées” ». Ce précepte « né et développé dans les institutions monastiques a
joué un rôle important dans la constitution de la subjectivité moderne » et
avec lui commence l’herméneutique de soi». (p.
40-41)
Note 20, p. 58 : leçon 29 avril 1981 Foucault insiste sur cette transformation «qui
représente d’après lui une vraie innovation et même une “rupture” dans
l’histoire de la subjectivité occidentale”. Il explique alors que “l’exigence
de connaissance de soi chez les chrétiens ne dérive pas du gnôthi seauton” car les techniques de soi chrétiennes ne visent pas
à établir une relation à la vérité en général (comme c’était le cas pour
Socrate ou Platon), mais visent plutôt à établir un rapport à sa propre vérité, à la vérité de soi-même, et cela en particulier à
propos du péché » (p. 58)
Objectif de
cette conférence : « esquisser la manière dont l’aveu et l’examen de soi ont
été conçus par les philosophes païens [grecques et latines] » (p. 40)
Objectif
principal des écoles philosophiques grecques : la transformation de l’individu,
donner à l’individu la capacité qui lui permît de vivre différemment, mieux, de
façon plus heureuse que les autres (p. 41) [note 21, p. 59: Foucault songe aux études de Pierre Hadot,
selon lequel « la philosophie ancienne était avant tout une manière de vivre
qui avait pour but d’opérer une transfiguration du mode d’être des individus
qui la pratiquaient, et non pas une construction théorique »]
Place de
l’examen de soi et de l’aveu dans les écoles philosophiques grecques:
- À première
vue [orientation générale], l’obligation de dire la vérité sur soi-même occupe
une place réduite parce que:
1)
l’objectif de la formation philosophique était d’équiper l’individu d’un
certain nombre de préceptes lui permettant de se conduire dans toutes les
circonstances de la vie sans perdre la maîtrise de soi à le
discours du maître doit dire, persuader, expliquer (la verbalisation est du
côté du maître); il doit donner au disciple un code universel pour toute sa
vie. (p. 41) ;
Note 22, p. 59 : Pur décrite les caractéristiques de la parole du maître à l’intérieur
des pratiques anciennes de direction, Foucault introduit dans L’herméneutique du sujet la notion de parrêsia
: « La parrêsia c’est au fond ce qui répond, du côté du
maître, à l’obligation de silence du côté du disciple. Tout comme le disciple
doit se taire pour opérer la subjectivation de son discours, le maître, lui,
doit tenir un discours qui obéit au principe de la parrêsia s’il veut que ce
qu’il dise de vrai devienne enfin, au terme de son action et de sa direction,
le discours vrai subjectivé du disciple. » [HS p 348]
2)
le lien avec le maître était provisoire (n’implique pas une relation
d’obéissance, la direction antique vise à l’autonomie de celui qui est dirigé).
Raisons pour lesquelles on sollicite le
conseil d’un maître : a) pour supporter une épreuve ou un revers de fortune
; b) pour être capable un jour de se conduire de façon autonome et ne plus avoir besoin de
conseil (p. 42)
-
Cependant cette orientation générale, il y a avant le christianisme des
techniques pour découvrir et exprimer la vérité au sujet de soi. [Certaine continuité].
Importance croissante de ces techniques liée à : 1) le développement de la vie communautaire [2] dans les écoles philosophiques (pythagoriciens et
épicuriens); 2) la valeur accordée au modèle médical dans les écoles
épicuriennes ou stoïciennes. (p. 42)
Foucault
propos d’étudier cette évolution de
la civilisation grecque et hellénistique à partir de deux passages de Sénèque
(stoïcien de l’époque impériale au moment de la naissance du christianisme) qui
sont de bons témoignages de la pratique de l’examen de soi et de l’aveu. (p. 42)
1e
passage : De ira (p. 43): 1)
à première vue, vocabulaire judiciaire: il semble
que le sujet est, à l’égard de lui-même, à la fois le juge et l’accusé
(divisé en deux) : à la fois accusé qui avoue son crime au juge, et juge [scène
judiciaire] ; 2) mais en fait, il s’agit plutôt d’un vocabulaire
administratif (administration des biens
et du territoire) : « à l’égard de lui-même, [Sénèque] n’est pas un juge
qui doit punir, il est plutôt un administrateur qui, une fois le travail
effectué ou les affaires de l’année terminées, fait les comptes, établit le
bilan, et voit si tout a été fait correctement. Sénèque est un administrateur
permanent de lui-même plus qu’un juge de son propre passé » (p. 44).
- Différence
entre faute et erreur : « Ces fautes [sur lesquelles il se fait des reproches]
ne sont pas réellement des fautes ; ce sont des erreurs […] » Pourquoi ? a)
soit parce qu’il n’avait pas conscience des fins que le sage doit s’assigner
[non intentionnel] b) soit parce qu’il
n’avait pas appliqué de façon correcte les règles de conduite qu’il faut en
déduire. Les fautes sont des erreurs en
ce sens qu’elles sont des mauvais ajustements entre les fins et les moyens.
(p. 44)
- La
remémoration des erreurs se produit dans
le but de mémoriser des règles qu’on doit appliquer : « Sénèque ne se
remémore pas ces fautes pour se punir ; il a seulement pour but de se souvenir
des règles qu’il devait appliquer. Cette
mémorisation a pour objet de réactiver des principes philosophiques
fondamentaux et de réajuster leur application. […] Le sage doit mémoriser ses
actes pour réactiver les règles fondamentales. » (p. 44) ; différence par rapport à
l’aveu chrétien qui mémorise la loi pour découvrir les péchés –
inversion; discontinuité
dans le but de la pratique, dans la fonction de l’auto-reproche) [voir point 3
de la caractérisation qui fait Foucault]
Caractérisation
de l’examen de conscience [sorte d’aveu à soi-même]:
-
1)[3] finalité de l’examen de soi [discontinuité] : «
il ne s’agit pas du tout de découvrir la vérité cachée dans le sujet
[chrétienté] ; il s’agit plutôt de se
rappeler la vérité oublié par le sujet. » (p. 44)
- 2)
L’objet duquel il faut (¿?) se souvenir [discontinuité]:
« Ce que le sujet oublie n’est pas lui-même, ni sa nature, ni son
origine, ni une affinité supranaturelle [chrétienté] ; ce que le sujet oublie est ce qu’il aurait dû faire, c’est-à-dire
une série de règles de conduite qu’il
a apprises. » (p. 44)
- 3) «La
remémoration des erreurs […] sert à mesurer la distance qui sépare ce qui a été
fait de ce qui aurait dû être fait » (p.
44-45) [Administration ¿?. Voir p. 44] – [notes du cours 20/03] Il se demande sur la manière d’agir
par rapport à un but ou sur les erreurs qui l’empêchent d’obtenir ce but. Il ne
se demande pas : “ pourquoi est-ce que j’ai commis cet faute ?” ou “est-ce que
je veux réellement obtenir mon but ?”].
- 4)
Caractérisation du sujet : « le sujet qui pratique cet examen de lui-même […]
est le point où les règles de conduite se rassemblent et s’enregistrent sous la
forme de souvenirs. Il est en même temps le point de départ d’actions plus ou
moins conformes à ces règles. Le sujet
constitue le point d’intersection entre un ensemble de souvenirs qui doivent
être mis au présent et des actes qui doivent être régulés. » (p. 45) Le sujet « n’est pas le terrain
d’exercice d’un processus obscur qui doit être déchiffré ».
L’examen
de soir accompagne d’autres pratiques stoïciens [Berkeley a, p. 45: qui sont un moyen d’incorporer un code
d’actions et de réactions] : 1) lecture continuelle du manuel de préceptes
[pour le présent] ; 2) examen des maux qui peuvent arriver (praemeditatio malorum) [pour le
possible] ; 3) énumération chaque matin des tâches à accomplir [pour le futur];
4) examen de conscience du soir [pour le passé]. à « Le soi, dans tous ces exercices, n’est pas considéré
comme un champ de données subjectives qui doivent être interprétées [chrétienté,
discontinuité]. Il se soumet lui-même à l’épreuve d’une action possible ou
réelle. » (p. 45)
Aveu
aux autres (exposition de son âme que l’on fait à un ami, un conseiller, un
guide) chez les grecques : c’est une «pratique qui n’était pas très développée
dans la vie philosophique » mais qu’on trouve : 1) dans les écoles épicuriennes
; 2) dans le modèle médical : Galien, Plutarque [« Il y a beaucoup des gens
malades qui acceptent la médecine et d’autres qui la refusent. L’homme qui
cache la honte de l’âme, son désir, son malaise, son avarice, sa concupiscence,
a peu de chance de faire des progrès. En effet, parler de son mal révèle sa
propre méchanceté. La reconnaître au lieu de prendre plaisir à
la cacher, tout cela est signe de progrès[4] . » (p. 45-46) [Voir le modèle chrétien p.
73]
2e
passage : début du De tranquillitate
animi (p. 46) :
1) Pour
ne pas rester « comme sur un bateau qui n’avance pas, mais est secoué par le
roulis » et échapper à cet état, Serenus décide de faire l’aveu avec Sénèque. «
Il dit qu’il veut verum fateri, dire
la vérité, à Sénèque » (p. 46) [Variante
Berkeley a, p. 46 : « mais à travers de cet aveu de son propre état, il
demande à Sénèque de lui dire la vérité au sujet de celui-ci : Serenus au même
moment avoue la vérité et est dépourvu de vérité »]
2)
Nous pouvons identifier dans le discours/aveu de Serenus trois domaines [trois
questions morales courantes, trois types d’activité possibles pour un homme
libre] : le cadre de l’exposition de Serenus est défini par une classification
des différents types d’activité que l’on peut exercer et des fins que l’on peut
poursuivre [À la
différence du christianisme: il n’est pas défini par le cours réel de son existence,
par ses expériences réelles ni par une théorie de l’âme] (p. 47).
3)
Dans ces domaines, Serenus révèle son attitude en énumérant ce qui lui plaît et
ce qui ne lui plaît pas. [À la différence du christianisme : il ne cherche pas à révéler ses désirs profonds en tant
que moyen de la concupiscentia.] «
Pour lui, il s’agit de son propre état, et d’ajouter
quelque chose à la connaissance des préceptes moraux. Cette addition à ce
qui est déjà connu est une force qui serait capable de transformer la pure
connaissance et la simple conscience en un véritable mode de vie. »
Discours
de maître essaie d’additionner à ce qui est déjà connu une force pour
transformer la connaissance en un mode de vie. Pour faire cela, Sénèque utilise
d’arguments, de démonstrations et d’exemples persuasifs pour expliquer à quel
point la vérité est vraie. Le discours de Sénèque a pour objectif de
transformer certains principes en une force victorieuse, de donner une place à la vérité en tant que force. (p. 47-48) [À la différence du christianisme: il
ne s’agit pas d’ajouter à certains principes une force de coercition venant
d’ailleurs]
Berkeley a, p. 48 : Serenus révèle son propre état : il ne fait pas une
énumération de fautes passées [christianisme] ; il donne un état des dépendances en faisant
une sorte d’inventaire de la liberté dans le cadre d’un code d’actions et en
disant quels sont les liens qui l’attachent à des choses dont il n’est pas le
maître (choses à propos desquelles il est dépendant). Serenus fait cet aveu non
seulement pour exposer le véritable état de son âme mais aussi pour apprendre
de Sénèque la vérité au sujet de lui-même. Cette vérité dont Serenus a besoin
n’est pas une connaissance des principes moraux qu’il connais déjà ; Sénèque
aide Serenus à se situer sur le chemin qui doit le conduire à la terra firme des vertus à partir de
l’addition de la force [le reste de la variante est pareil à la version
définitive]. (p. 48-49)
Note 34, p. 61 : le thème de la « vérité en tant que force » était repris
dans le cours au Collège de France de 1981-1982 où Foucault présente l’ascèse (askêsis)
ancienne comme une « pratique de la vérité » (voir définition) et où il précise
que même s’il faut que « cette vérité affecte le sujet », il n’est pourtant pas
question (à la
différence du christianisme) « que le sujet devienne objet d’un discours
vrai ». (p.61). L’askêsis ancienne
vise à équiper le sujet pour qu’il puisse répondre aussitôt qu’il le faut aux
événements de la vie, et cet équipement est constitué par des logoi (des discours) qui sont « schémas
inducteurs d’action » : quand ils sont présents dans la tête de celui qui les
détient, celui-là agira comme spontanément. Comme si c’était ces logoi eux-mêmes qui parlaient pour lui
non seulement lui disant ce qu’il faut faire, mais faisant effectivement, sur
le mode de la rationalité nécessaire, ce qu’il faut faire. L’askêsis ancienne « fait du dire-vrai un
mode d’être du sujet» : elle a pour sens et pour fonction d’assurer « la
subjectivation du discours vrai » [HS, P. 233, 303-313 et 316]. Note 37, p. 63: L’ascèse
philosophique est « une certaine manière de constituer le sujet de connaissance
vrai comme sujet d’action droite », un sujet qui se donne comme corrélatif de
soi-même un monde qui est perçu, reconnu et pratiqué comme épreuve »
[différence christianisme: voir note 37]
Conséquences – caracterisation de la vérité chez Sénèque: (p. 49-50)
- 1) La
vérité (dans ce jeu entre l’aveu de Serenus et la consultation de Sénèque)
n’est pas définie par une correspondance avec la réalité, mais comme une force inhérente aux principes et qui
doit être développée dans un discours.
- 2) Cette
vérité est quelque chose qui est devant l’individu comme un point d’attraction
qui l’attire vers un but [À
la différence du christianisme: il ne s’agit pas de quelque chose qui
est cachée sous la conscience dans la partie profonde de l’âme]
- 3)
Cette vérité est acquise par une explication rhétorique de ce qui est bon pour
quiconque veut s’approcher de la vie du sage. [À la différence du christianisme : elle n’est
pas acquise par une exploration analytique de ce qui est supposé être réel dans
l’individu].
- 4)
Cet aveu est orienté vers la constitution d’un soi qui peut être au même moment
et sans discontinuité sujet de
connaissance et sujet de volonté [soi gnomique]. [À la différence du christianisme :
n’est pas orienté vers une individualisation de l’individu par la découverte de
certaines caractéristiques personnelles].
- 5)
Cette pratique de l’aveu et de la consultation reste dans le cadre de la gnômê [2 sens, à la fois est 1) l’unité de la
volonté et de la connaissance et 2) une courte phrase par laquelle la vérité
apparaît dans toute sa force et s’incruste dans l’âme des gens.]
Note 35, p. 62-63 : Différentes usage du mot gnômê chez Foucault : 1) études d’Œdipe roi de Sophocle : la gnômê
est, avec la technê, l’attribut
fondamental du savoir et du pouvoir d’Œdipe ; la gnômê est un savoir « qui n’apprend rien de personne »; la gnômê
veut dire « avis, opinion, façon de juger » en opposition à un savoir obtenu
après une recherche ou une découverte de la vérité. Plus précisément, gnômê est « un mot technique qui fait
partie du vocabulaire politico-judiciaire de la Grèce au Ve siècle »
et qui indique l’avis que le citoyen est amené à donner au cours d’une
délibération politique ou à la suite d’un procès judiciaire. 2) Ici dans ces
conférences Foucault donne une interprétation différente; de façon similaire,
dans la leçon du 6 mai 1981 il explique que le mot indiquait à la fois une
connaissance et une précepte, une vérité et une règle.
Berkeley b [à
partir du point 5 la fin est différente]:[5] Le rôle de l’aveu
la consultation et l’examen de soi est de faire place à la vérité en tant que
force. Les aspects de la vérité considérée comme une force sont : 1) un
souvenir permanant dans l’individu et son discours intime [la mémoire est la
force de la vérité quand elle est en permanence présente dans l’âme] et 2) une
rhétorique persuasive dans le conseil du maître. Par conséquent l’examen de soi
et l’aveu sont un jeu de vérité dont l’objectif est de faire de l’individu un
lieu où la vérité puisse agir en tant que force réelle par la présence du
souvenir et l’efficacité du discours.
Note 38, p. 63: Jeux de vérité sont « l’ensemble des règles selon
lesquelles, à propos de certaines choses, ce qu’un sujet peut dire relève de la
question du vrai et du faux » [et plus à investiguer].
Berkeley b [à
partir du point 5 la fin est différente]: L’examen de soi et l’aveu restent dans le cadre de la gnômê [la
définition est pareil, mais il donne un exemple de la gnômê en tant que phrase]. Dans la première forme de la philosophie grecque[6] , les poètes et des
hommes divins disaient la vérité à travers des gnômai courtes et impératives. L’examen de soi et l’aveu chez
Sénèque et Marc Aurèle étaient une sorte de développement de cette gnômê.
« Le
type de sujet qui est proposé comme modèle et comme objectif dans la
philosophie grecque ou hellénistique ou romaine est un soi gnomique, où la force de la vérité ne fait qu’un avec la forme
de la volonté. » (p. 50)
Les
éléments constitutifs du modèle du soi gnomique (nécessité de dire vrai au
sujet de soi-même, rôle du maître et du discours du maître, long chemin qui
conduit à l’émergence du soi) nous les trouvons aussi dans les technologies de
soi chrétiennes mais avec une organisation différente. [Continuité]
Note 37, p. 63 : Discontinuité
et continuité « Selon Foucault, le christianisme “hérite” plusieurs
techniques de soi élaborées par la philosophie ancienne mais il les inscrit
dans un cadre différent, marqué par de nouvelles modalités d’exercice du
pouvoir et par de formes inédites d’extraction de la vérité. Les techniques de
soi acquièrent alors, en réalité, des effets de subjectivation opposés par
rapport aux techniques anciennes, en donnant lieu à un sujet « dont les mérites sont identifiés de manière
analytique », un sujet « qui est assujetti dans des réseaux continus
d’obéissance [et] subjectivité par l’extraction de vérité qu’on lui impose ».
Cf. STP, p. 188
Discontinuité :
- Dans
l’organisation païenne, le soi doit être constitué par la force de la vérité
[organisation du soi – gnomique – comme cible ou but], à partir de la
superposition et la surimposition de la volonté et de la vérité. – Cette force
de la vérité réside dans la qualité rhétorique du discours du maître [Berkeley b, p.
64: et dans la capacité
mnémonique de l’individu] et cette qualité rhétorique dépend en partie de la
présentation du disciple. (p. 50-51).
[Berkeley b, p.
64: la capacité mnémonique et la
qualité rhétorique dépendent en partie de l’art de la mémoire et de l’art de la
persuasion.] L’examen de soi et l’aveu sont orientés vers
l’organisation du soi gnomique [[organisation du soi – gnomique – comme cible
ou but].
[Berkeley b, p.
64 : les technologies de soi dans le monde antique sont liées à des
arts comme la mnémotechnique et la rhétorique]
- Dans
l’organisation [des technologies de soi] chrétienne, le problème est de
découvrir ce qui est caché en soi; le soi chrétien est comme un texte obscur
que nous devons découvrir, déchiffrer et faire venir à la lumière. (p. 50)
[Berkeley b, p.
64 : les technologies de soi dans le christianisme sont liées à un art
de l’interprétation]
Note 37, p. 63 : Leçon du 24 mars 1982. Foucault affirme que l’ascèse chrétienne a pour fonction de fixer quels sont les renoncements
nécessaires qui doivent conduire jusqu’au point de renoncement à soi-même.
[Différence avec ascèse philosophique : voir note 34, p. 61]
L’organisation
chrétienne est décisive pour la généalogie du soi moderne. (p. 51)
[5]Acá Foucault hace énfasis en ambas
prácticas, en la otra versión no menciona en este punto el examen de sí.
Además, y esto se relaciona con el hecho anterior, Foucault acá insiste en la
capacidad mnemonica además de hablar de la eficacia de los discursos; en la
versión posterior borra toda referencia a la capacidad mnemónica. ¿Por
qué hace esto?
[6]Antes del paso al logos habla de
filosofía!
Paso
del mito al logos, es decir, de una concepción donde el mediador, inspirado por
Mnemosyne, decía verdades eternas reinstaurando cada vez el orden en el mundo,
a una forma que no reconstruye el mundo sino que busca su origen y busca
¿interpretar? su funcionamieto. Evidentemente cuando borra el papel de la memoria, Foucault tiene que borrar también esta referencia a los poetas. En
cuanto a por qué la denomina como primera forma de filosofía, quizás sea
precisamente porque quería hacer énfasis en el arte de la memoria y la
persuación y no en el de la interpretación. (para establecer una suerte de
continuidad)